Analyse énonciative visuelle : « Copacabana Palace »

Pour illustrer mes propos sur l’analyse énonciative visuelle, j’ai décidé de me concentrer sur une série de photographies réalisées par Peter Bauza, photographe allemand. Série que nous avons pu découvrir en Septembre dernier à Visa pour l’image Perpignan.

« Copacabana Palace », titre de la série de clichés photographiques, a reçu le Visa d’or dans la catégorie magazine. Elle a été présentée à Paris en mars 2017 à la galerie Cosmos.

« Copacabana Palace », nom dédié assez ironique, est en réalité un hôtel cinq étoiles qui illumine la plage de Rio. Ce que le photographe nous montre avec cette série de photos, c’est la souffrance de ces personnes qui tentent de survivre dans l’espoir qu’un jour, cela s’améliore. Par souci de recontextualisation, Peter Bauza fait l’état des lieux d’un projet immobilier dans la banlieue de Rio de Janeiro commencé il y a 30 ans. Aujourd’hui, les immeubles sont délabrés et menacent de s’effondrer, les blocs d’immeubles sont devenus le refuge pour quelques 300 familles « sans toit, ni terre ».

J’ai fait une sélection de 3 images pour essayer de les analyser au mieux sans trahir l’histoire racontée par le photographe.

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Sur la première image, nous voyons 3 enfants, allongés sur un lit, avec une femme enceinte.

Photo prise en plongée, le photographe rend compte de la photo et l’ayant prise en hauteur par rapport aux sujets. Le locuteur, ici Peter Bauza, prend ces photos afin de les exposer au monde.

On s’aperçoit sur cette première image que le moment de vie capturée est intime, nous sommes plongés avec les personnages. Le photographe nous y plonge avec beaucoup de proximité. Le locuteur choisit de nous montrer uniquement les personnages allongés, on devine l’environnement et les conditions dans lesquels ils se trouvent : une chambre sombre éclairée par la seule lumière du jour. On imagine également que la femme présente est la mère des 3 enfants sur l’image : 2 des enfants ont leurs mains posées sur le ventre de leur mère enceinte, un d’entres eux a les yeux fermés, ainsi que la mère.

La lumière, les positions et l’environnement suggèrent que les personnages sont en train de faire la sieste, dans un milieu de vie hostile : On imagine la mère élevant seule ses 3 enfants, bientôt quatre, avec peu de ressources.

Copacabana Palace

Sur la seconde photo, le locuteur nous montre deux personnages qui dansent dans un environnement miteux.

Le photographe se place devant les personnages, avec autant de proximité que sur la première photo. Il veut rendre compte au mieux de la réalité émotionnelle du moment.

Il y a une ambivalence dans cette photo : les couleurs sont vives, joyeuses, et l’action des personnages suggère également la fête : la femme danse avec l’homme en tenant un verre d’alcool à la main, en fumant une cigarette. L’homme sourit, apprécie le moment. Il est habillé avec une chemise rouge, assez vive, que l’on remarque très rapidement quand on regarde la photo. Des guirlandes de couleurs sont accrochées aux murs, on ne sait cependant pas si elles ont été placées pour la photo, pour l’événement, où si elles étaient là avant. Par contre, l’environnement suggère la misère. L’établissement que nous apercevons en second plan est délabré, sale, tous les signes de pauvreté sont présents : les ordures et le débris en bas des immeubles, les fils qui pendent aux fenêtres de l’immeuble, la dégradation et la détérioration des murs.

 

Copacabana Palace

Sur la dernière image, quatre personnages sont présents. Deux petites filles, une femme et un homme. La prise de vue se fait de face, on a l’impression que la présence du photographe n’est pas signalée. Aucun regard n’est porté sur l’objectif.

Les couleurs sont vives, comme sur la photo précédente. Les canapés jaunes, le rideau rouge, et les couleurs extérieurs sautent aux yeux.

Les positions des personnages suggèrent un moment de détente, la femme a une des petites filles sur ses jambes allongées, l’homme est face à la fenêtre, regard porté sur la petite fille. La seconde petite fille joue sur un des canapés jaune.

Comme sur l’image précédent, l’environnement est synonyme de misère : le bloc ne détient pas de fenêtre, le rideau à l’air de faire office de fenêtre, les murs sont sales et le poster est déchiré, mal accroché. Cette fois-ci, il n’y a aucun signe distinctif de joie, c’est un simple reportage d’un moment de détente en famille.

Peter Bauza décrit 7 mois passés auprès de sans-abris comme  » le Paradis et l’Enfer, la folie et la passion », frappé par l’entraide qui régnait. Le locuteur capture des instantanés de la vie intime des personnages, dans des moments de fêtes, de détentes qui forment un récit de souffrance sur fond de misère sociale. Les personnages sont à la foie mélancolique et joyeux, comme le suggère les photos : à la fois lumineuse et triste, face à des situations de vie hostiles.

 

Fiona Goldstein.

 

 

 

 

 

Analyse d’une interview de Thierry Ardisson : Tout le monde en parle, émission diffusée sur France 2, le 23 mars 2002.

Lien de la vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=2XpiXYAsuXw

J’ai décidé d’analyser l’énonciation dans une interview de Thierry Ardisson. D’un côté parce que Thierry Ardisson aborde de façon décomplexée n’importe quels sujets, et de l’autre parce son style est très controversé.

Egalement le discours journalistique me paraît intéressant pour les voix qui s’y mélangent. Chacun peut prendre la parole en s’adressant aux allocutaires concernés.

Alors, comment Thierry Ardisson interview sur des sujets sensibles/personnels, dans quel but et pour quel public ?

Dans le but d’analyser la situation d’énonciation de cette vidéo, j’ai identifié ses conditions de réalisation, à savoir :

  • Les énonciateurs : Thierry Ardisson (locuteur principal) et Milla Jovovich
  • Les destinataires des énonciateurs (les allocutaires) : Spectateurs, invités de l’émission
  • Le lieu de l’énonciation : Plateau télé
  • Les déictiques temporels : pour situer le moment de l’énonciation et le moment du récit
  • Les pronoms possessifs et démonstratifs
  • Les verbes

Au début de l’interview, le locuteur commence : « Milla Jovovich vous êtes née en 1975 à Kiev, en Ukraine, à l’époque où c’était encore l’URSS»

Ici, le locuteur capte l’attention de l’interviewé par l’adjectif « vous ». Malgré qu’il y ait plusieurs allocutaires, le locuteur ne s’adresse qu’à une seule personne.

Egalement il y donne un contexte : l’actrice en question est étrangère, née « à l’époque » de l’URSS. C’est un récit.

Intervention de Laurent Baffie qui devient le locuteur à son tour : « Par amour ». Phrase prononcée dans le but d’amuser le public, les téléspectateurs et les invités autour de la table, qui provoque le rire de ceux-ci.

Après une jingle musical, Ardisson reprend l’interview : « Alors, vous êtes la fille d’une actrice qui s’appelle… ». Ici, avec le mot  « alors », le locuteur replace au centre l’interview. Marque un temps de re-contextualisation.

0’28 : Milla Jovovich répond à Thierry Ardisson : « my mom ». Ici, le destinataire devient l’énonciateur. En effet, l’actrice acquiesce ce que vient de lui dire le locuteur principal, en rappelant qu’elle parle d’elle avec le pronom personnel « ma ».

0’45 : « c’est sa mère » : Thierry Ardisson, regarde la caméra afin de réagir à ce que vient de lui dire l’actrice. Ici les destinataires de l’énonciation ne sont autres que les téléspectateurs et le public, car il signifie par le pronom démonstratif « sa ».

0’53 : « Milla Jovovich votre famille quitte l’Ukraine… ». L’énonciateur redonne le cadre, et se sert du prénom afin de désigner son allocutaire, pour former une transition dans l’interview.

1’08 : « C’est presque réussi en même temps ».

Ici l’énonciateur, s’adresse au public, aux téléspectateurs en jetant un coup d’œil à la caméra alors que tout le long de l’interview, Ardisson s’adresse directement à Milla Jovovich.

1’10 : « Alors, à l’âge de 9-10 ans vous commencez à faire des petites publicités, des spots de pubs, vous jouez dans un premier film, et votre carrière, c’est incroyable, débute à l’âge de 11 ans »

Avec les mots : « alors », « premier », l’énonciateur poursuit son récit, toujours en donnant un cadre spatio-temporel, afin que cela soit compréhensible par ses allocutaires.

« C’est incroyable » : sert à donner du relief à son récit, à y donner de la vie, mais surtout à signifier le caractère extra-ordinaire du parcours de la jeune actrice à cette époque.

1’44 : « oui, effectivement, en fait, il jetait… »

Trois mots dit à la suite par le locuteur secondaire (Milla Jovovich), qui affirme ce que vient de lui dire Ardisson par le « oui, effectivement ». Le « en fait » sert de transition dans l’énonciation du récit.

1’55 : « Alors, vous gagnez Milla très rapidement beaucoup d’argent » de la même façon le locuteur principal s’adresse à l’actrice.

Un invité prend la parole : « ça fait combien en euro » : emploi anaphorique qui assure une reprise sémantique : l’argent.

2’07 : « et à l’âge de 15 ans vous avez gagné votre premier million de dollars. C’est à dire qu’à l’époque où les gens de demandent ce qu’ils vont faire dans la vie, Milla se demandait avec qui elle allait signer un contrat voilà ».

Ici, le locuteur utilise des temps de verbe différent pour appuyer le cadre temporel dans lequel se trouve le récit.

« voilà » : mot qui fait office de conclusion.

2’29 : « et votre mère fait annuler le mariage, heureusement qu’elle était là, Milla ! ».

Changement de temps également et personnification : le locuteur veut capter l’attention du destinataire, représenté uniquement dans ce contexte par l’actrice et non pas les téléspectateurs.

« Moi je voulais une carte de crédit » : l’énonciateur, Milla, se désigne.

3’18 : « So, Milla, donc vous vivez à Londres » : Nous sommes encore en présence de mots qui marquent la transition « so » et « donc » en insistant sur le prénom, le locuteur veut capter l’attention de l’interviewé.

4’02 : Après l’incident, Ardisson utilise un verbe comme étant performatif et interpelle un homme du public : « Va la chercher », qui se lève aussitôt.

Thierry Ardisson propose des interviews, dans le contenu, intéressantes car elles sont à la fois empathiques et agressives.

Cependant, comme nous l’avons signifié précédemment, il réutilise les mêmes mots, pour marquer des transitions par exemple, et nous voyons que dans cette interview, il a du mal à capter pleinement l’attention de son interviewé (en la rappelant à l’ordre à chaque prononciation de son prénom), Milla Jovovich, qui se veut très dissipée.

Cependant, il sait re-contextualiser, notamment par des changements de temps verbaux, ainsi qu’avec des indices spatio-temporels.

Fiona Goldstein

Les barber afro, des Etats-Unis à Paris

Connu sous le nom de barbier en français, le barber n’est autre que le coiffeur pour homme. Dans la culture afro-américaine ce métier est empreint d’un fort capital symbolique et culturel grâce au mouvement Barbershop. Le mouvement s’exporte à merveille auprès des diasporas africaines à Paris. Retour sur les origines du mouvement Barbershop et sa traversée de l’Atlantique pour la capitale française.

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Aujourd’hui lorsqu’on entend parler de Barbershop, plusieurs choses nous viennent à l’esprit : on pense au célèbre film d’Ice Cube en 2002 ou encore à ces salons de coiffures afro-américains d’Harlem, avec des barber de talent produisant des coiffures aussi impressionnantes que extravagantes. En réalité les Barbershop sont à l’origine un mouvement liant coiffure et musique, et trouvant ses racines dans l’Angleterre du 17e siècle. Ce mouvement a connu de nombreuses évolution, il a traversé les générations jouissant toujours d’un franc succès au fil des années jusqu’à venir s’installer en France et dans les rues de Paris à la fin du 20e siècle et au début du 21e.

En effet, dans les années 1600, les coiffeurs anglais ont alors l’habitude d’avoir une cithare dans leur salon, et de laisser la clientèle jouer quelques notes en attendant de se faire coiffer. Dans certains cas, de véritables chansons sont produites. Ce concept pourtant très simple devient le « barber’s music », la musique de barbier.

Cette tradition se poursuit lors de la fondation des États-Unis. Durant la deuxième moitié du XIXème siècle, la music Barbershop continue son expansion en s’inspirant énormément de la culture et de la musique afro-américaine. C’est à ce moment là que se développent les Barbershop afro.

Dans un contexte très particulier d’esclavage, puis de ségrégation, la population américaine est en proie à de vives tensions communautaires. Au milieu de ces clivages, la communauté afro-américaine souhaite aussi affirmer sa propre culture et son identité. Les Barbershop sont les lieux symbole de cette volonté d’expression culturelle, et ce jusqu’aujourd’hui. Dans la culture afro-américaine la chevelure est d’une importance capitale car mis à part la couleur de peau, elle est le symbole corporel d’une authenticité et d’une singularité du peuple afro-américain. La chevelure rappelle par conséquent les origines ethniques, elle a une forte valeur symbolique. Les barber alors amenés à s’occuper de cette chevelure, ils ont comme la mission de gérer un héritage culturel important, et l’image physique de la population. Le métier de barber est donc considérer comme très important au sein de la culture afro-américaine tout comme le Barbershop car il devient lieu cristallisant ce patrimoine.

Les artistes vont être ceux qui vont avoir le rôle le plus important dans la promotion de la coiffure afro, notamment chez les hommes. On voit le rôle capital joué par les humoristes et les stars de la musique. Les artistes vont être à l’origine de beaucoup de phénomènes de modes. Ils vont initier les tendances afin de montrer la diversité et la richesse du savoir faire afro-américain dans le domaine de la coiffure avec pour objectif de toujours affirmer l’identité de la communauté.

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Ici Will Smith dans la célèbre série Le Prince de Bel Air. Beaucoup de jeunes issus des quartiers populaires vont déclarer s’identifier à ce personnage.

Le mouvement Barbershop va traverser l’Atlantique pour occuper une place tout aussi importante à Paris. Il va s’installer dans la capitale française grâce aux diasporas africaines. En effet, les similitudes entre afro-américain et diaspora africaines françaises sont évidentes. Compte tenu de son passé coloniale, la France compte sur son territoire d’importantes diasporas issues notamment de l’Afrique de l’ouest et de l’Afrique subsaharienne. L’histoire des afro-américains inspirent totalement les diasporas africaines qui sont confrontées aux mêmes défis d’intégration et aussi à cette volonté de ne pas oublier leur culture. La coiffure rentre aussi dans ce défi là. Les Barbershop « afro français » sont donc aussi un lieu d’expression de culture et d’identité, mais cette fois-ci des diasporas africaines de France. A Paris, le mouvement Barbershop connaît un franc succès auprès notamment de la jeunesse. Cela s’explique par l’influence de la culture américaine auprès des jeunes, l’« american way of life », ainsi que la place prépondérante de la musique, et surtout du hip-hop constamment associé à l’image des Barbershop afro. Dans la capitale française, le mouvement s’est beaucoup sédentarisé dans les 18e  et 19e arrondissements de Paris. Stanley, plus connu sous le nom de Barber Stano témoignent de la place du mouvement aujourd’hui au travers de ces photos.

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Barber Stano, coiffeur du salon de la Cleanik (Paris 19e) : « les clients adorent l’ambiance Barbershop, c’est un lieu de partage, ils se sentent dans leur élément et comme chez eux avec la musique. C’est aussi un lieu de Paris où les jeunes des diasporas africaines se sentent à l’aise et se retrouvent pour parler culture »

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Barber Stano : le cheveu crépu est unique, il ne se traite pas comme les autres, on peut faire tellement de chose avec. Il faut apprendre à en être fier car c’est une partie de nous, de notre identité »
Au travers de l’évolution du mouvement Barbershop, c’est une leçon qu’on apprend : la coiffure est un art et une forme d’expression culturelle puissante et unique.

 

 

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